Dates à venir...
La Biodanza,
Une Promesse Inachevée...
... Qui mérite cependant d’être expérimentée…
J’écrivais il y a une quinzaine d’années : « L'être humain dispose d'une aptitude naturelle au bonheur. Nous vous proposons une méthodologie fondée sur le rythme, la musique, la danse … ; un processus… d'ouverture à soi-même, à l'autre, et au monde » pour atteindre le bonheur. Un processus « capable d'extraire le meilleur de la nature humaine ». « … à condition toutefois de le vouloir vraiment ».
Un processus « capable d’extraire le meilleur de la nature humaine » et « à condition de le vouloir vraiment ». Car l’être humain est aussi, par nature, peu porté vers le goût de l’effort. Dieu seul sait, et notre âme, en effet, combien il nous est difficile de stimuler notre volonté au quotidien.
Cet article est une matière à réflexion. Cette critique est surtout issue de mon expérience. Et en tant que telle, elle ne saurait refléter l’expérience de tout à chacun.
Pour comprendre notre propos, il est nécessaire au préalable de décrire la Biodanza. Je le ferai de manière concise car plusieurs livres ont déjà été écrits à ce sujet.
Décrire ce qui s’expérimente par le corps n’est pas un exercice facile. Car les approches corporelles sont parsemées d'émotions, de sensations et de ressentis. Chacun ira peut-être de son imaginaire en affirmant : « Ah oui ! ça ressemble à ceci », « Ah, oui ! ça ressemble à cela », comme j’ai pu l’entendre bien des fois. Et parfois même en dehors de toute expérience. En réalité, pour avoir testé un certain nombre de pratiques corporelles, et à mon humble connaissance du moment (car il en existe tellement), il n’en est rien.
La Biodanza n’a pas d’équivalent. Cette affirmation n’exclut pas que certains exercices, ou certaines musiques, ont peut-être été empruntés à d’autres et inversement. Quoi qu’il en soit, il existe une méthodologie propre à la Biodanza. Alors, en quoi diffère-t-elle foncièrement des autres méthodes de développement personnel ? Quels sont ses bienfaits ? Où se situerait éventuellement son originalité ? Permet-elle d’atteindre le bonheur, son objectif initial ? Sur quels critères s’appuierait cette recherche du bonheur. Et pourquoi, le cas échéant, pourrait-elle ne pas répondre favorablement à l'éternelle question du bonheur ? Je répondrai à chacune de ses interrogations dans la limite de ma compréhension du système, de mes observations et de l’expérience acquise depuis 2009.
La Biodanza a été créée dans les années 70 par Rolando Toro, un psychologue clinicien d’origine chilienne. Il se questionne très jeune sur la question du bonheur. Curieux de connaitre l’avis de ses contemporains, il réalise un sondage auprès de trois cents personnes (d’autres avancent six cents) pour savoir ce qui les rend pleinement heureux ? A la lecture des réponses, Rolando découvre de multiples raisons à la question du bonheur. Il parvient néanmoins à classer les réponses en cinq grandes catégories. Le bonheur consiste pour certains à se maintenir en bonne santé. Pour d’autres, il se réalise dans une œuvre créatrice sans pour autant lui donner, ni l’exclure, une dimension élitiste. D’autres encore mettent l’accent sur l’importance de l’affectivité. Certains encore attirent l’attention sur la nécessité d’une sexualité épanouie. D’autres enfin trouvent leur bonheur dans la Foi et/ou la religion. Il constate que chacune de ces catégories correspond à un besoin humain : la vitalité, l’affectivité, la créativité, la sexualité et la transcendance. Nous pourrions aussi les appeler des « lignes d’expression » en ce sens où elles sont inhérentes à l’espèce humaine. Chacun de ces concepts, très concrets par ailleurs puisqu’ils correspondent à des besoins, est clairement définit en formation.
De plus, il constate que l’éducation, et c’est encore vrai de nos jours, ne permet pas un développement harmonieux de ces différents besoins. Il observe également que ces lignes d’expression se sont développées de manière très inégales pendant l’enfance. D’où parfois, peut-être, la sensation d’un manque indéfinissable ressenti à l’âge adulte. Pour pallier à ce constat, il crée plus de deux cent cinquante propositions. Certaines d’entre elles se dansent seuls, à deux, d’autres en trinôme, voire davantage. Chaque atelier comprend en moyenne douze exercices. Ils ont pour objectif de stimuler de manière équanime et progressive chacune de ces lignes d’expression.
Comment se déroule une séance en Biodanza ? Le facilitateur décrit techniquement la proposition. Puis, il montre en musique de quelle manière cette proposition peut se mettre en mouvement. C’est un exemple parmi tant d’autres. C’est l’exemple du Facilitateur. Le participant peut choisir son partenaire ou se laisser choisir. Chaque participant s’exprime alors sur le rythme et/ou la mélodie de la musique. Il en est de même si la proposition se réalise à deux, à trois, voire à plusieurs. Le rendu de sa danse doit réunir trois aspects : 1/ Respecter la consigne, 2/ Rester dans l’esprit de la proposition et 3/ Danser son ressenti de la musique. En outre, il a la possibilité de danser ou de ne pas danser. Chaque séance stimule sainement le système nerveux dans sa partie sympathique (activation progressive du mouvement) et parasympathique (ralentissement progressif du mouvement). Cet aspect représente à mon sens l’élément le plus original, efficient et créatif de sa méthode.
Ainsi, et quel que soit notre âge, la méthode actualise certaines parts de nous-mêmes encore inhibées, endormies ou peu développées. Elle révèle les besoins qui ont été sous-alimentés pendant l’enfance… comme ceux qui ont connu un meilleur développement. De fait, le processus crée certaines appréhensions. Car il amène l’individu à se confronter parfois à ce qu’il ne connait pas, ou peu, à ce qu’il redoute et qu’il pressent comme un écueil ou une difficulté. De plus, le déploiement de ces lignes d’expression amène peu à peu un sentiment dit de « complétude ». Si le sujet entre dans le processus, il dépasse effectivement certains obstacles et actualise nécessairement un potentiel. L’individu peut alors recouvrir l’estime de lui-même, le sens de sa valeur, la confiance, etc… Ce qui permet à terme d’accéder à une certaine forme de bonheur.
Les ateliers comprennent également des jeux récréatifs. Ils se réalisent, en règle générale, à deux, à trois, voire à plusieurs. Cette proposition permet d’approcher l’autre dans l’innocence et la spontanéité. C’est une joie sincère, exaltante et authentique qui s’expérimente dans l’ici et maintenant, comme les enfants le font à merveille naturellement.
Cette description simple et suffisante pour notre propos permet de comprendre que cette approche psychocorporelle est fondée sur la rencontre humaine. C’est un autre aspect de son originalité.
Au cours de ma facilitation, j’observe un processus d’ouverture à l’autre quasi-unanime et une recréation progressive de liens. Ce processus ne rencontre aucun obstacle particulier chez le participant si les trois conditions suivantes sont réunies :
1/ Le Participant se respecte dans son évolution. Ce qui n’est pas aisé car il doit alors se différencier à l’intérieur d’un groupe humain, et éventuellement dire « non », ne serait-ce que pour se respecter. Or, l’individu a aussi un besoin d’appartenance à un groupe.
2/ Le Facilitateur doit respecter le rythme d’évolution de chacun. Ce qui exige une attention toute particulière à ses ressentis (agréables comme négatifs) pour éviter toute projection et ainsi ne pas interférer dans la progression du participant.
3/ Le Facilitateur doit appliquer rigoureusement la méthodologie. Ce qui n’est pas facile car certaines personnes sont davantage extraverties lorsque d'autres sont plutôt introverties. Le premier sera beaucoup plus à l’aise dans l’activation progressive du mouvement et, inversement, le second s’exprimera plus facilement dans le ralentissement progressif du mouvement. Rares sont les personnes capables de se maintenir dans un développement harmonieux de ces deux tendances.
Je ne peux malheureusement pas m’étendre sur ces différents points qui mériteraient cependant que l’on s’y arrête davantage. Pour autant, nous avons déjà une idée un peu plus précise sur le processus de développement. Cette progression s’inscrit-elle dans un ensemble de changements périphériques ou d’une transformation en profondeur ?
Il existe autant de réponses que d’individus. Car l’expérience de chacun est unique. Certains participants « dansent » ou pratiquent depuis des mois, voire des années, et/ou suivent régulièrement des stages. Aussi, chacun ne commence pas au même âge, ni avec les mêmes problématiques, et encore moins et surtout avec le même niveau de conscience. Toujours est-il que cette ouverture s’exprime ensuite parfois/souvent au quotidien sous une forme excessive tant l’enthousiasme est débordant. Cette ferveur est contenue dans la méthodologie elle-même. Le Facilitateur expérimenté a la faculté d’amplifier comme celle d’amoindrir cette exaltation. Alors, dans le meilleur des cas, le Facilitateur peut réajuster ce qui nécessite d’être amélioré, si toutefois l’idée même de ce réajustement effleure son esprit. Quoi qu’il en soit, le participant se sent appeler vers une meilleure version de lui-même.
Chaque participant a en effet le sentiment et la sensation de progresser. Cependant, si nous faisions un examen de conscience, que pourrions-nous effectivement confier à notre âme ? Avons-nous la sensation et le sentiment d’avoir réellement dépassé certains schémas préjudiciables ? Que ressentons- nous quelques jours après un stage ou un week-end de formation ? Quels sont nos rêves ? Je veux parler de ceux que nous recevons la nuit ? Que disent-ils sur nous-mêmes ? Que se passe-t-il à l’issue de quelques semaines, quelques mois ? Avons-nous toujours le sentiment d’être aussi rempli ? Et avons-nous alors des années plus tard le sentiment d’être « guéri » dans certaines parts de nous-mêmes ? Qu’est-ce qui a finalement véritablement changé ?
Lorsque je me suis formé à la biodanza, j’étais en psychothérapie depuis une dizaine d’années. C’est ce qui m’a permis de m’impliquer chaque fois davantage. L’action volontaire avait un sens personnel. Et je ne suis pas en train de dire qu’il faut être en thérapie pour aller plus loin ou donner du sens à son action. Car l’expérience du sens embrasse également « la nature, la religion, l’art et les relations humaines ». La psychothérapie m’a aussi permis de mieux comprendre mes sensations et mes ressentis. Quelle est la part de la psychothérapie et de la biodanza dans mon évolution personnelle ? Je n’ai aucune certitude à ce sujet. Ces deux aspects ont très certainement communiqué à mon insu.
A la fin de ma formation, je me suis cependant senti envahi d'une tension psychique insupportable : le doute et la trahison revenaient sans cesse dans mon esprit. L’un des aspects de cette tension portait sur les effets réellement bénéfiques de la biodanza. Pour autant, j’ai animé un cours hebdomadaire parce qu’il m’était demandé d’apprendre à animer un groupe humain. Et sincèrement, je ne le regrette pas. Ce fut une expérience joyeuse, parfois difficile, voire douloureuse. Cette expérience m’a néanmoins révélé un chemin à explorer.
En tant que Facilitateur, et à l’issue de toutes ses années d’enseignement, il est possible de résumer mon expérience par cette notion de « Promesse Inachevée ». Si le processus apporte bien des "joies" à court terme, il ne s’installe pas à moyen terme, à moins que les émotions ou les difficultés rencontrées ne soient directement traitées en psychothérapie. Cette démarche n’est pas non plus une garantie absolue. C'est le fruit de mon processus et de mes observations, certes, trop peu nombreuses pour en déduire une loi générale. Pour quelles raisons alors la Biodanza ne permettrait-elle pas un changement en profondeur ?
Pour ce faire, j’évoquerai trois raisons principales, même si les deux dernières pourraient découler de la première.
1ère raison.
Nous apprenons en formation que cette voie est fondée sur le développement de la partie « saine » de l’individu. Le psychologue dirait : « sur la partie innée ou acquise ». Ce qui suppose, implicitement, sans jamais la nommer, une partie « malsaine ». Dans cette perspective, une partie de nous-même est rarement convoquée dans le processus. Le thème n'est pas abordé parce qu’il ne fait pas partie du programme. Mais aussi parce qu’il est la conséquence de toutes sortes de disqualifications vécues pendant l’enfance : « Cesse de faire ceci », « Tu parles trop fort », « Est-ce que tu peux rester tranquille », « Encore une mauvaise note, décidément, tu n’arriveras à rien », etc… Le fondateur s’est levé pour combattre la disqualification et toutes les formes de terrorisme relationnel. Rolando TORO a fait le choix de qualifier et d’encourager. Ce qui est à mon sens une belle attitude. L’encouragement et la qualification sont deux-maitres mots en Biodanza.
Cependant, lorsqu’un aspect de la nature humaine est privilégié, l’autre aspect est refoulé et peut conduire à une soudaine dissociation. Car l'excès de Bien porte en lui les germes d'une compensation par le Mal. Ce refoulement se manifeste parfois/souvent dans les rêves, et les actes manqués, pour prévenir ou compenser. Et ce que certains nommeront une fatalité en situation de crise aigüe, comme pour minimiser, était en réalité tout à fait prévisible.
Ainsi, cette voie n’encourage pas le regard intérieur, cette descente dans les abysses de la personnalité, c’est-à-dire de son tempérament, de son caractère, et de son inconscient personnel. Et pour cause, ce n’est pas sa vocation. Le groupe en Biodanza n’est pas un groupe psychothérapeutique. Et je ne peux pas in fine lui reprocher ce que la Biodanza n’est pas. Sauf que cette dernière laisse entendre de manière très claire qu’elle offre une voie de transformation. Or, l’être humain en biodanza ne peut pas se différencier foncièrement, au risque de déplaire et d’être paradoxalement rejeté par ses pairs. Je n’évoque pas ici une simple hypothèse. C'est précisément l'entrée dans un processus de différentiation qui permet une réelle évolution intérieure.
Cette première raison à elle toute seule anéantit toute possibilité réelle et structurelle d’évolution. Car en mettant l’accent sur un aspect de la réalité, l’individu se coupe de l’autre aspect tout aussi réel, celui qui précisément permettrait de créer une tension et d’opérer de véritables changements… L’individu se complait inconsciemment dans un groupe qui stimule et entretient les louanges et les gratifications. Le sentiment de différenciation n’existe pas, même si le sujet a réellement l’impression du contraire. C’est le propre des groupes qui fonctionnent sur le confort et le consensus. Dès lors, la méthode n’agit pas (ou peu) sur les comportements conditionnés et les mécanismes de défense. Mais encore une fois, ce n’est pas sa vocation. Pourquoi l’individu a-t-il alors le sentiment sincère de progresser et de développer ce qui fait sa spécificité ? C’est vraiment très simple.
Nous avons osé transgresser et vaincre certaines de nos limitations, nous faisons preuve de créativité, nous exprimons notre affectivité, nous avons davantage confiance en nous-mêmes et nous nous aimons, alors, et à juste titre, l’être humain croit avoir opéré une transformation. Nous assistons en réalité à l’émergence d’un « ego spirituel ». Par suite, cette voie engendre à l’insu de l’individu et à des degrés divers, une forme d’inflation psychique. Il est plus facile de transgresser, parfois/souvent, au détriment de l’autre, que d’interroger ses motivations profondes à agir dans le sens d’un (prétendu ou réel) dépassement de soi. « Oser être soi » ne se fait pas aux dépens de l’autre.
2ème raison.
« Oser être soi » est un slogan bien ancré en Biodanza. Car il permet de « combler nos manques ». C’est la grande promesse du système. Il est vrai que le participant aboutit à une expression de plus en plus libre de lui-même. Il en est ainsi parce que le cadre devient relativement vite perméable et in fine aveuglément permissif. La transgression est du reste encouragée. Une liberté d’être qui atteint très vite les limites du possiblement correct et du raisonnable, ainsi qu’une absence notable de discernement.
Nous savons aujourd’hui que les slogans de mai 68, « Il est interdit d’interdire » ou « Jouir sans entraves », n’ont pas été une réponse adéquate à la question du bonheur. Bien au contraire, nous avons assisté à un abus et à une prédation sans précédent sous le couvert de la recherche d’une prétendue libération sexuelle. « Ne crois pas qu’on ne puisse jamais détruire la luxure en la satisfaisant à satiété »1. Alors, l’être humain peut-il combler tous ses manques ?
Combien de fois ai-je entendu entre deux séances, ou deux stages de formation, ou à l’issue des congés scolaires : « ça m’a manqué ». C’est élogieux, certes, à l’adresse du Facilitateur… bien que très discutable. Car il ne sait pas vraiment ce qui motive réellement la présence de chaque participant. Pour autant, la réponse aux manques en Biodanza consiste très souvent en la restauration du plaisir dans des formes les plus variées. Nous goûtons aux plaisirs dans le respect de l’autre bien sûr… enfin, presque… car les consignes manquent parfois/souvent (à dessein ?) de précisions. Cette lacune (volontaire ?) ouvre alors la porte à des transgressions qui dénaturent parfois littéralement l’objectif même de la proposition.
Certains manques, en lien avec la matière, peuvent être effectivement facilement comblés. Un grand nombre de propositions en Biodanza participe de cette nourriture tendre et affective. Nous en avons tellement manqué. Et nous en avons tellement besoin. Aussi, j’ai constaté que l’individu en demande encore et encore, comme s’il devenait soudainement un puit sans fond. Il en est parfois/souvent ainsi parce que certains manques, à y regarder de plus près, ne sont plus véritablement en relation avec la matière.
Certains manques ne peuvent pas être comblés sur le plan matériel, mesurable et tangible. Cette observation n’est pas enseignée en Biodanza. C’est un plan qui se situe au-delà du physique, aussi subtil soit-il, et qui concerne le plan métaphysique. Si je ressens de la démesure dans mon comportement, par exemple, il me faudra travailler sur la tempérance. il me faudra nécessairement développer une énergie psychique capable de me hisser intérieurement vers la tempérance. C’est un bien métaphysique. Ce genre de biens, immatériel par essence, ne s’obtient pas avec une contrepartie matérielle. Il nécessitera une « réflexion adéquate » et une concentration de « forces psychiques et physiques » inhabituelles. Cette « puissance inattendue » [est] souvent de loin supérieure à un effort volontaire et conscient 2 ».
Toujours en relation avec le manque, une Science Traditionnelle plusieurs fois millénaires nous enseigne que l’être humain est « frappé » dès la naissance au cœur de son être. Il s’agit d’une blessure transgénérationnelle ressentie à l’âge adulte comme une carence, un manque ou une déficience. Ce manque ne peut pas être comblé au niveau du « moi, je ». Il faudra alors vivre bien des expériences pour identifier et comprendre sa nature, apprendre à la gérer, l’assimiler, lui donner du sens, et s’en libérer par un comportement adéquat et soutenu. Elle peut alors se transformer en une « blessure sacrée », et devenir ainsi une source de créativité. Dans cette situation, le petit moi est inopérant. Ainsi, nous comprenons que le manque est inhérent à l’espèce humaine et certains d’entre eux ne pourront pas être comblés car la Biodanza se déploie seulement au niveau du « petit moi ». Pourquoi ?
3ème raison.
Nous allons approfondir cet aspect. Comme je l’écrivais précédemment, cette voie est fondée essentiellement sur la stimulation du désir. L’objectif consiste à effacer progressivement les inhibitions, les appréhensions, les retenues, et in fine les écueils qui altèrent la rencontre humaine. Ce qui est louable. Une grande partie des exercices en biodanza ont été créés dans cette perspective. Si au départ, cette proposition est raisonnable, souhaitable, exemplaire même et légitime, elle finit à moyen terme par engendrer des effets pervers3. D’une part, il existe une infinité de désirs, du plus brut, voire sournois, au plus raffiné, voire fallacieux. Car soudainement, ou progressivement, le cadre se relâche (volontairement ?). Et le participant, encouragé par une certaine manière de faire, se croit légitimement investi d’une forme de permissivité. Elle n’existe que dans son imaginaire. L’autre devient alors un prolongement de lui-même. Ainsi, les propositions peuvent réveiller la prédation et la perversité derrière un bon mobile : le courage d’être soi. En fait, l’autre est réifié à notre insu. Nous agissons essentiellement pour nous-mêmes.
De surcroît, « l’ajout de désirs à d’autres désirs », aussi finement choisis, cantonne ipso facto l’individu dans la sphère du désir. En conséquence, l’individu s’enferme dans une dépendance. Elle stagne sur un plan horizontal. La situation n’évolue pas malgré la grande diversité des exercices. Pourquoi en l’état actuel des choses, la situation ne peut-elle pas évoluer ?
La situation ne peut pas évoluer parce qu’elle œuvre encore une fois sur un seul aspect. Je me permets d’insister sur ce propos car il aveugle totalement le participant et le Facilitateur. Rien de plus normal au début d’un processus aux sensations plurielles. Ces dernières peuvent être : désir, plaisir, confort, louanges, transgression, réconfort, gratifications, qualification, posture maternelle, être soi, etc. Les formes sont extrêmement diversifiées. C'est une forme de cloisonnement où « la main droite ignore et doit ignorer ce que fait la main gauche ». Pour autant, la méthode n’intègre pas le second aspect qui, par nature, engendre l’alternance et l’évolution. Cet oubli déclenche la Promesse Inachevée. Or, l’être humain doit apprendre à vivre avec son ombre. Ce qu’il fait du reste très souvent au quotidien, peut-être inconsciemment, ne serait-ce que pour répondre à un besoin d’adaptation à sa propre réalité. De quoi s’agit-il ?
Nous pensons le jour par rapport à la nuit. Nous ressentons le chaud parce que nous avons expérimenté le froid. Nous nommons le juste parce que nous avons éprouvé l’injuste. Or la Biodanza ne s’exprime pas au sujet de la nuit, du froid et de l’injuste… ou de manière occasionnelle. La Biodanza est dans la recherche permanente d’un seul aspect. Un aspect = une possibilité sous une infinité de formes mais toujours rattachées à cette même possibilité. Peut-on considérer l’Oiseau sans le Serpent, l’Esprit sans la Matière ? « Les contacts matériels qui donnent le froid et le chaud… le plaisir et la douleur… apprends à les supporter… » 4.
En effet, les deux termes, plaisir et douleur, forment un couple indissociable. Ignorer l’un des deux altère la réalité. L’adoption d’un seul terme est une illusion et une profonde hérésie. L’exclusion du second terme « a fait, et fait encore, des dégâts dans le mental individuel et collectif… le refoulement de cet aspect double … porte la responsabilité d’un dualisme néfaste que la psychologie cherche … à surmonter 5 ». Ainsi, nous vivons en réalité dans une atmosphère New-Age. Nous mettons un pansement, puis la fois d'après, nous changeons de pansement. Et ainsi de suite... Ce n’est pas une coïncidence si l’étiquette « bisounours » colle tant à la peau de la Biodanza depuis des décades.
Cependant, il m’a été rapporté deux miracles. Une personne sur sa chaise roulante s’est levée pour danser. Une femme qui ne parvenait pas à avoir un enfant est tombée enceinte. A-t-on étudié l’anamnèse de ces deux personnes ? Etaient-elles suivies depuis des années par un spécialiste, en plus d’être des participantes régulières au cours de Biodanza ? De plus, s’est-on intéressé sur ce que ces mêmes personnes avaient vécu quelques semaines, quelques jours, voire la veille de leur miracle respectif ? Et ces miracles leur ont-elles permis de s’éveiller à un plan supérieur de la conscience humaine ? Et ces miracles ont-ils vraiment eu lieu ? Face à ce genre de phénomène, il me semble que nous devrions garder une immense réserve. Car nous serions peut-être à même d’expliquer seulement cinq à six pour cent de ce qui s’est réellement passé… Ce qui n’exclut pas que la biodanza a certainement participé à la réalisation de ces situations, comme elle participe à la "mise à jour" d'un certain potentiel.
La Biodanza vise effectivement à actualiser le potentiel de l’être humain. Pour autant, il serait plus juste d’affirmer qu’elle permet d’actualiser un potentiel horizontal. Car la biodanza œuvre sur la vitalité, l’affectivité, la créativité, la sexualité et la transcendance en tant que besoins humains. Nous restons à l’intérieur de la personnalité. J’y reviendrai.
En revanche, la contradiction, source de conflits, renferme dans ses profondeurs une réelle possibilité d’évolution car elle oblige à une verticalité. Or l’équilibre, c’est-à-dire la recherche d’harmonie s’obtient parce que nous avons reconnu et accepté en amont une situation de tension. Cette tension est la rencontre de deux termes contradictoires. Et c’est la résolution de cette contradiction qui permet d’accéder à un état réellement qualifié de « supérieur ».
En effet, cet état de tension ne peut pas naitre d’un seul mais de deux aspects. « … La contradiction signifie … une possibilité d’évolution… car la tension entre les contraires cherche un équilibre » 5. « C’est l’interaction des antinomies » qui concoure « à un plus haut niveau de conscience ». Ce « plus haut niveau de conscience » emprunte le chemin d'une ascension sous la forme d’une spirale. C’est ce même niveau de conscience, travaillé encore et encore, qui permet l’intégration puis la suppression de la dualité. Dans la Trinité Chrétienne, « le Père, le Fils et le Saint-Esprit », c’est le Saint- Esprit, le troisième élément, qui « abolit la dualité… qui parachève la trinité et qui, par conséquent, restaure l’unité 2 ». La restauration intérieure de cette unité apporte un bonheur stable que nul ne peut nous voler, ni même la mort. Car un tel accomplissement positionne l’être humain au-delà de la dualitude.
Enfin, j’aimerais évoquer avec humour quelques observations que j’ai entendues dans ma propre Ecole de formation. Ces mêmes propos ont été tenus douze années plus tard.
La Biodanza met au même niveau Freud, Jung et Rolando Toro. Est-ce bien sérieux ? N’est-ce pas une forme de fanatisme ? Aurait-il apprécié cette comparaison ? Et au-delà de l'appréciation de son œuvre, cette dernière reste limitée pour les raisons évoquées plus haut. Cette fascination obscurcit l’esprit. Elle plonge ses racines dans l’exploitation du désir, du plaisir sous toutes ces formes, et ipso facto dans le refus d'accepter la limitation, la loi.
De plus, selon certains propos tenus en formation, Jung aurait souhaité qu’un homme puisse un jour danser les archétypes. Selon la Biodanza, Rolando TORO serait cet « homme providentiel ». Pour avoir lu l’œuvre de Jung à quatre-vingt-dix pour cent (dans sa traduction française), je ne suis pas encore « tombé » sur de tels propos. Je ne parle aucune langue étrangère. Il ne m’est donc pas possible de me prononcer sur des écrits qui n’ont pas été traduits dans ma langue maternelle. La possibilité de danser les archétypes devrait interpeler quiconque qui s’est quelque peu intéressé à la notion d’archétypes, tel que Jung l'entendait.
Etienne PERROT, disciple et l'un des traducteurs de JUNG, a comparé l’archétype à un torrent qui peut tout ravager. Mais ce torrent peut aussi, rajoute-il, être « canalisé et maitrisé ». L’archétype, au sens Jungien du terme, est donc une force et une énergie de la nature. Comme le précise Etienne PERROT, l’archétype est une « manifestation de l’énergie psychique [qui] peut causer des effets aussi bien désastreux que salutaires ». Ainsi, l’archétype est une énergie psychique considérable destinée à être intégrée pour être maitrisée. Sur le plan psychique, et c’est le point de vue et l’expérience de Jung, cette énergie est « l’équivalent de la maitrise de l’énergie nucléaire ». Fait-on référence aux sept centres énergétiques contenus dans le corps humain, de véritables volcans en sommeil, et mieux connus sous le nom de « Chakras » ? Je ne le sais pas. Toujours est-il que Nietzsche, comme d’autres, ont succombé dans cette confrontation aux images archétypiques. Cette confrontation aux images de l’inconscient collectif (archétypes) constitue, pour Jung, « une transformation radicale, une mort suivie d’une résurrection ». C’est dans ce combat que Nietzsche s’est laissé engloutir par ces mêmes forces lorsque d’autres, comme JUNG, entre 1913 et 1918, ont orienté ses images archétypiques au service de la conscience humaine, si chère à JUNG. « Dans le vocabulaire de Nietzsche, rajoute Etienne PERROT, on peut qualifier le résultat ainsi obtenu par JUNG d’humanisation du surhumain ». Ainsi, nous comprenons que Danser les Archétypes au sens propre comme au sens figuré relève du domaine transpersonnel. Ce domaine d’existence, réservé au petit nombre, m’est totalement étranger. Il ne m'est donc pas possible d'écrire à ce sujet.
Un jour, il nous a été demandé de danser la folie. Je suis entré dans cette proposition corps et âme. Quelques mois plus tard, la Folie s’est soudainement invitée dans le réel de mon existence. Nous étions l’un en face de l’autre. Ce moment m'a littéralement fasciné et paralysé.
Autre fait qui mérite d’être relevé. La Biodanza affiche des propositions comme « Biodanza et Yi-King », « Biodanza et Tarot », « Biodanza et Astrologie », « Biodanza et Chamanisme » pour n’en citer que quelques-unes. Est-ce bien sérieux ? Le Yi-King, le Tarot, l’Astrologie et le Chamanisme, en l’occurrence, deviennent sournoisement à la dérobée des hypostases de la Biodanza. La Biodanza se voit ainsi placer au Cœur d’une matrice qui attire des « disciplines » ou des pratiques plusieurs fois millénaires. Or, n’oublions pas que la biodanza est née dans les années 70. Nous sommes alors dans une forme collective d’inflation psychique. Comment alors ne pas associer la Biodanza à Nabuchodonosor ? La biodanza EST dans la démesure.
En outre, à ce jour, et sauf erreur de ma part, il n’existe pas de preuve scientifique concernant les réels effets bénéfiques de la Biodanza. j'évoque ici d'effets structurels. Et pourquoi des études sérieuses sur un large échantillon n’ont-elles pas été réalisées depuis les années 70 pour démontrer la validité de ses bienfaits ?
Je ne peux m’étendre davantage, ni accumuler inutilement les exemples et les réflexions. Je le ferai au risque de me répéter. J’apporterai au mieux une nième argumentation qui, en l’état, me parait suffisante. Cette critique ne prétend pas être exhaustive. Elle n’exclut pas non plus les contre-exemples. Chacun de ses points décrit en revanche des failles sérieuses dans le système Biodanza. Je laisse aux universitaires du mouvement le soin de réfléchir sur mon humble expérience. Pour autant, il ne fait nul doute que la Biodanza œuvre dans un processus d’ouverture et de création de liens, un processus de restauration capable de nous amener potentiellement vers un peu plus d’humanité.
Conclusion : Où en suis-je ... ?
Après deux, trois, cinq, voire dix, quinze ou vingt années de pratique et/ou de facilitation en Biodanza, plusieurs questions se posent si je veux connaitre le baromètre de mon intériorité.
Où en suis-je par rapport à ma colère, ma rage, ma violence ?
Où en suis-je de la maitrise de mes humeurs, de mes plaintes, de la critique et des verbiages sans fin ?
Où en suis-je par rapport à ma jalousie et ma dépendance affective ?
Où en suis-je de ma blessure d’abandon, d’injustice et de trahison ?
Où en suis-je de mes excès et mes addictions ?
Où en suis-je dans ma relation au pouvoir, à la sexualité et l’argent ?
Où en suis-je dans ma capacité à m’autogouverner ? Quel est le degré de mon attention et de ma capacité à déployer ma volonté ?
Où en suis-je par rapport à ma rigidité, ma difficulté à lâcher-prise, à la peur de manquer ?
Quid de mes « petits » mensonges ?
Où en suis-je de mon désir de plaire, de vouloir me mettre en avant, ou de ma tendance à fuir les conflits et à manipuler ?
Où en suis-je de mon estime de moi-même ?
Où en suis-je par rapport à mes réactions face aux évènements contrariants ?
Où en suis-je par rapport à la patience, le courage et la tempérance ?
Où en suis-je de ma relation à l’amour, l’amitié et l’intégrité ?
Où en suis-je de mes propres réactions face à mon père et à ma mère ?
Où en suis-je dans la relation avec mon anima (pour les hommes) et de mon animus (pour les femmes) ?
Où en suis-je de mon discernement, cette capacité à agir de manière juste les yeux bandés ?
Où en suis-je de ma capacité à accepter que l’autre soit contrarié, voire blessé, après lui avoir dit « non » ?
Où en suis-je de ma faculté à prendre des décisions qui ne sont pas partagés par mon entourage proche ?
Dans l’exercice de la facilitation, j’ai été amené à me confronter à des situations complexes et douloureuses. Ce sont celles que j’ai inconsciemment créées pour m’aider à grandir un peu. Il ne m’a pas été facile d’animer un groupe humain. Ses remises en cause m’ont amené sur un chemin un peu plus étroit et rigoureux, mais profondément plus simple. L’aspiration - ce qui élève la nature humaine - l’emporte sur le besoin et les plaisirs, sans pour autant les exclure. Car ils constituent à mon sens un passage nécessaire vers une véritable évolution. Je ne peux pas me détacher de ce qui n'a pas été à un moment donné attaché. Le désir se déploie sur un plan horizontal. Il limite l’expression de l’individu car il le cantonne dans une tonalité affective parfois/souvent inadéquate, infantile et sans relief.
En revanche, et sans nier pour autant nos instincts et nos besoins, l’aspiration dessine une volonté d’embrasser un mouvement ascensionnel. C’est ce mouvement, ajouté à l’immanence, qui modifie véritablement l’état de conscience de l’être humain. Car ce mouvement vertical émerge de l’intérieur. La tâche n'est pas aisée parce qu’elle exige une discipline rigoureuse et une solide autogouvernance. « Quiconque s’observe lui-même avec attention et sans concession sait [qu’il est habité] par [un petit moi] qui aimerait bien voiler et dissimuler tout ce que la vie comporte de pénible et de problématique pour s’ouvrir une voie facile et libre 5 ». Or, « une souffrance acceptée peut se transformer peu à peu en calme, en sérénité et en force 7 ». A cette étape, nous sommes encore très éloignés de la « complétude » tant décriée et galvaudée en Biodanza. Pour autant, nous commençons à entrer dans un processus d’alliance, si chère à Jung, parce que nous apprenons à supporter, sans se résigner, la nécessité d’accueillir la dualité de l’existence. C’est cette capacité à « supporter » qui déclenche un processus d'harmonisation et d’individuation.
L’accès à l’individuation signe un engagement sans faille à l’endroit de l'acceptation du deuxième terme qui, lui-même, engendre souvent à notre insu l'entrée dans le troisième terme. Par ce troisième terme, l’être humain se sent réellement habiter et différemment. C'est une sensation intérieure. C’est le début d’une Sagesse pratique. C’est la capacité d’embrasser le plaisir et la douleur avec la même amplitude. C’est la Promesse Alchimique de Mercure lorsqu’il réunit le bien et le mal. C’est l’acceptation pleine et entière des affres et des joies de l’existence humaine.
D’autres parviendront certainement à des conclusions différentes. D’où l’importance de respecter chacun dans son processus unique et singulier. Puissions-nous explorer ce que notre conscience nous suggère. C’est peut-être un bon moyen pour se sentir un peu plus en paix. Certains voient l’expérience comme une finalité lorsqu’elle devrait peut-être s’inscrire dans une réflexion et une croissance intérieure.
L’enseignement de la dualité en tant que thème de réflexions et d’apprentissage est absent dans le programme de la Biodanza. Pourtant, la dualité est à l’origine de toutes les souffrances humaines. L’intégration de la dualité met au monde ce que certains nomment l’unité. Cette bénédiction divine permet d’être « de moins en moins affecté par les circonstances extérieures », à tout le moins, continuer à ressentir une certaine joie de vivre au-delà des aléas, séparation et mort comprises. C’est cette volonté d’intégration qui permet de se hisser vers le troisième terme. C’est une Promesse inscrite dans le Cœur de tous les Hommes, comme il est promis de passer biologiquement de l’enfance à l’adolescence, puis de l’âge adulte et à la vieillesse. Autrement dit, de passer du besoin au désir et du désir à l’aspiration. Ce n’est qu’une question de temps. Mais cette progression s'inscrit dans l'évolution humaine, celle-ci même qui nous rapproche de notre âme. Cette évolution nécessite l’intervention de la Volonté, de l’Amour, de la Sagesse et de l’Intelligence. Cette progression ne s’obtient pas en tournant les pages d’un livre de psychologie positive. L’évolution s’acquiert dans la résolution de nos difficultés quotidiennes. C’est une énergie qu’il faut parfois aller chercher profondément à l’intérieur de soi. Et cette énergie dirigée vers le « haut » engendre parfois des moments inattendus de grâce.
La quête du bonheur est un Art de Vivre au quotidien qui ne se limite pas à une pratique de deux heures par semaine. Elle nécessite une présence (une attention) capable de revisiter quotidiennement ses faits et gestes sans aucun jugement. C’est un début de confrontation avec soi-même. Cette présence à soi nécessite d’explorer, de se tromper et de recommencer. C’est une étincelle et une chaleur qui se dessine sur le chemin de la spirale. C’est un Art qui permet de se confronter, de se pardonner, de tirer des leçons, un Art qui nécessite des réajustements, une maitrise de soi, de la discipline, du courage et de l’humilité. Cette manière d’être au monde s’exprime souvent dans le silence, seul avec soi-même. C’est peu glorieux pour l’ego qui souhaiterait exister sous les projecteurs. Pour autant, c’est une partie du travail intérieur que l’autre ne voit pas - tout au plus pourrait-il le percevoir - pendant que l’Autre se réjouit et modifie notre perception du monde. Cette quête développe une patience qui permet au Temps de faire son œuvre. Car le natif sait que le véritable ennemi est logé à l'intérieur.
Le bonheur ne peut pas se fonder sur un objet extérieur qui par nature est visible, limité, temporel, périssable et mortel. Est heureux celui qui se sent « de moins en moins affecté » par les circonstances extérieures, qu'il soit seul(e) ou en couple. Il ne s’agit pas de devenir insensible mais d’accepter ce qui est – une chose et son contraire - pour permettre à l’âme de se mettre « sur la pointe des pieds », distiller ses particules de lumière dans ses corps, pour permettre à l’homme de réunir intérieurement les opposés complémentaires du Vivant.
Il s’ensuit alors l’émergence d’un troisième terme, l’incarnation d’un processus magique et inexorable d’élargissement et d’approfondissement de la conscience humaine. La création (3ème terme), n’est-elle pas le mariage de l’Esprit (1er terme) et de la Matière (2ème terme) ? Toute l’œuvre de C.G JUNG est enracinée dans cette quête de l’unité.
Ainsi, la volonté d’être heureux appelle des efforts constants. Et dans ce domaine, rien ne se perd : « Pas un effort, même le plus petit dans la direction bonne ou mauvaise ne peut s’évanouir du monde des causes 4 ». L’entrée dans le processus d’individuation permet de bâtir sa propre « Maison Illuminée ». C’est aussi la « Maison du recueillement ». Celle-ci ne s’éteint jamais parce qu’elle est régulièrement entretenue avec des mains propres. L’aspiration à se reconnecter à son âme engendre progressivement une simplicité retrouvée.
Cette simplicité retrouvée conduit à une certaine forme de bonheur. C’est un bonheur où les choses matérielles restent utiles mais deviennent secondaires. C’est un bonheur imprégné de la joie, de la spontanéité et de l’innocence de l’enfant dans un corps d’adulte. C’est un bonheur où l’opposé est regardé comme une pierre à polir, une opportunité à saisir, un travail privilégié à finir, un sacrifice (= rendre sacré) à réaliser. C’est un bonheur où les contraires dansent ensemble dans une dynamique de réconciliation au service du Soi (l’Atman des Indous). Ce bonheur se développe dans une pratique philosophique au quotidien et il s’entretient concrètement chaque fois que des circonstances agréables et négatives surviennent dans nos vies. Ne devons-nous pas « affronter des épreuves, des tumultes, des orages avant de sentir naitre une paix et une joie 7 » ?
Si nous posons un regard tendre et aimant à l’adresse de nos crises passées, de nos difficultés et de nos souffrances, nous découvririons alors que « nos remises en cause ont fait de nous ce que nous sommes ». La pratique de la facilité permet-elle de progresser ? En d'autres mots, si je reste dans le connu, puis-je évoluer ? Ce sont les efforts que nous déployons qui nous font grandir et évoluer, ceux qui précisément nous rendent plus forts, stables, courageux et aimants, ceux-là mêmes qui nous donnent cette sensation réelle de complétude, ceux-là-mêmes qui nous font réellement gagner un peu plus d'humanité.
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"La voix du Silence", H.P BLATVATSKY
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"Essais sur la symbolique de l’Esprit" de Carl Gustav JUNG - Albin Michel
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Un « effet pervers » est un effet contraire et « non conforme au résultat escompté », un effet « détourné de sa fin », celle qui était initialement prévue.
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La Bhagavad Gitâ ». Traduction d’après Shrî AUROBINDO
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Psychogénèse des maladies mentales » de Carl Gustav JUNG - Albin Michel
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Aïon – Etudes sur la phénoménologie du Soi, de Carl Gustav JUNG – Albin Michel
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C. G Jung et la voie des profondeurs. Article d’Aniela JAFFE.
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